« Chaque fois que je dois prendre l’avion, c’est la même chose. L’angoisse commence des semaines avant le vol : j’y pense tout le temps, j’ai du mal à dormir, j’imagine toujours le pire. Et quand je me retrouve dans la cabine, je suis obligée de prendre des anxiolytiques tellement je suis stressée. » Comme 20 à 30 % de la population environ, Nathalie a peur de l’avion. Une phobie qui l’empêche de voyager autant qu’elle le souhaiterait. « Une telle anxiété peut conduire certaines personnes à ne plus rendre visite à des parents installés dans un pays lointain, voire à refuser un poste important à l’étranger », constate Velina Negovanska, docteur en psychologie et cofondatrice du Centre de traitement de la peur de l’avion (CTPA), un cabinet de psychologues spécialisé dans la question. Pourtant, il s’agit bien du moyen de transport le plus sûr au monde, et de très loin. « En 2015, pour les avions civils de plus de quatorze places, on ne dénombre que quatre accidents en vol mortels dans le monde sur 37 millions de vols, détaille Xavier Tytelman, expert en sécurité aérienne. Ainsi, quelle que soit l’activité considérée, des moyens de transport jusqu’aux loisirs, vous serez toujours plus en sécurité dans un avion. » Des propos rassurants, mais qui, souvent, ne suffisent pas à faire disparaître les phobies.
Accidents spectaculaires
Parce qu’ils sont rares, les crashs aériens sont toujours très médiatisés. La mort simultanée de centaines de personnes et les images des débris marquent profondément les esprits et alimentent les peurs irrationnelles. « L’avion est un mode de transport assez récent, ajoute Velina Negovanska. Physiologiquement, nous ne sommes pas adaptés au fait de voler. Les turbulences en vol, les bruits que l’on ne s’explique pas, tout cela crée des sensations auxquelles nous ne sommes pas habitués. Notre cerveau interprète les événements de façon erronée, comme s’il y avait du danger, et cela nous induit en erreur. Ces phobies sont très liées à notre système de survie, qui nous dit “Ce n’est pas normal, sauve-toi”. » Le transport aérien nous place en outre dans une situation d’impuissance difficile à supporter pour ceux qui ont besoin de tout contrôler. Le fait de ne pas savoir ce qui se passe, de mettre sa vie entre les mains d’une personne que l’on ne connaît pas et d’être enfermé dans un espace clos n’arrange rien, surtout si l’on a tendance à souffrir de claustrophobie ou d’agoraphobie. D’une manière générale, les personnes qui ont peur en avion sont plus anxieuses que la moyenne. Mais il peut s’agir aussi de passagers qui ont eu une mauvaise expérience en vol : cela suffit à déclencher une phobie.
Des stages pour dédramatiser
Les techniques de sophrologie, de relaxation et de respiration qui permettent de se détendre et de prendre du recul peuvent aider à supporter la peur. Moyennant quelques centaines d’euros, les plus angoissés peuvent également suivre les stages antistress proposés par les compagnies aériennes ou par des centres comme celui du CTPA*. Au programme : exercices de gestion du stress à reproduire chez soi, techniques comportementales et cognitives pour modifier ses habitudes et ses pensées négatives, explications techniques sur le fonctionnement de l’avion et simulateur de vol. « On donne aux stagiaires tous les outils pour qu’ils puissent se confronter à leur peur et trouver des réponses à leurs questions : comment se passe un décollage, un atterrissage, que fait le pilote… On se rend compte à quel point les choses sont vécues différemment lorsque l’on est dans le cockpit et que l’on sait ce qui se passe. » L’information serait-elle donc bien la solution ? Quoi qu’il en soit, selon une étude menée par l’université Paris-Descartes, les personnes ayant suivi le stage du CTPA passeraient d’un niveau d’anxiété face à l’avion de « 9,5/10 avant le stage à 3,7/10 après, pour le premier vol », conclut Velina Negovanska.