L’affinité entre consommation de sel et pression artérielle était déjà connue. Les auteurs de l’étude parue dans le New England Journal of Medicine l’ont chiffrée : 1,65 million de victimes dans le monde. Le tort aux mauvaises habitudes individuelles et, surtout, à l’industrie agroalimentaire, car 80 % du sel consommé en Europe est caché dans les produits transformés : plats cuisinés, bouillons, sauces, pizzas, etc. « Sans parler des produits non emballés comme les produits de boulangerie ou la charcuterie », ajoute Pierre Méneton, chercheur au département de la santé publique et d’information médicale à l’Inserm*. Or, nous consommons deux fois trop de sel : 10 grammes pour les hommes, 8 grammes pour les femmes, au lieu des 5 grammes recommandés par jour. « L’effet majeur de la surconsommation de sodium est l’hypertension. Dix millions de Français en souffrent », précise le chercheur. Certes, la salière n’est pas la seule responsable de cette affection cardiovasculaire : l’âge, le surpoids, la sédentarité ou des apports insuffisants en potassium entrent aussi en jeu. Le lien entre diminution du sodium et réduction des maladies cardiovasculaires a toutefois été mis en lumière par les auteurs anglais, dont l’étude porte sur soixante-six pays.
Cultiver son jardin
Alors, qu’attend-on ? « Depuis dix ans, le discours des politiques français n’a pas changé et tourne autour de l’autodiscipline de l’industrie agroalimentaire, mais ce n’est pas suffisant. Il faut des mesures réglementaires et législatives plus contraignantes », estime le chercheur. En 2002, il a fait partie, à l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), du groupe de travail « Sel : valeur repère », qui préconisait de diminuer de 20 % la consommation de sel en cinq ans. Une recommandation restée lettre morte. Pierre Méneton ne prône pas l’interdiction absolue du sodium, l’un des éléments minéraux essentiels à notre corps au même titre que le potassium ou le calcium. Il pointe du doigt, avec les associations de consommateurs, le lobby des industries agroalimentaires : « Ce qui est vrai pour l’excès en sel l’est aussi pour le sucre ou les matières grasses », observe-t-il. Alors, pour ceux qui le peuvent, quelques herbes aromatiques cueillies sur le balcon seront toujours de meilleures alliées que la salière.