Une étude épidémiologique Ipsos menée pour la Fondation Pierre Deniker pour la recherche et la prévention en santé mentale, publiée lundi 26 novembre, révèle que plus d’un actif sur cinq (22 %) est dans une situation de « détresse orientant vers un trouble mental ». Les auteurs de l’étude, qui soulignent qu’il ne s’agit pas d’alerter sur une « simple » souffrance au travail mais bien sur un risque réel de voir apparaître une pathologie nécessitant une prise en charge médicale, plaident « pour une politique d’évaluation et de prévention ».
Portrait-robot du travailleur en danger psychique
Pour dresser un état des lieux des risques de troubles mentaux des travailleurs français, les chercheurs ont analysé quarante-quatre facteurs de risques psychosociaux, comme l’équilibre entre les exigences du travail et ses gratifications, l’autonomie et les marges de manœuvre, la qualité des rapports humains entre collègues et avec la hiérarchie, les conflits de valeurs, l’insécurité socio-économique… Ils les ont mis en relation avec les divers profils des personnes interrogées (âge, genre, statut social, état de santé, conditions de travail, localisation géographique, etc.) et avec certains signes de défaillance (symptômes physiques, anxiété et insomnie, dysfonctionnement social et dépression). Il ressort de ces travaux que la plus grande menace pour la santé mentale des travailleurs est le fait de ne pas réussir à concilier vie privée et vie professionnelle. Cette situation concerne 15 % des actifs sondés et « parmi eux 45 % présentent une détresse orientant vers un trouble mental, contre 18 % chez ceux qui n’ont pas cette difficulté », précise la fondation. Les résultats de l’étude pointent également un risque de trouble psychique plus élevé chez les femmes (26 %) que chez les hommes (19 %). La prévalence est aussi plus importante parmi les actifs travaillant plus de cinquante heures par semaine (35 %), ceux sans bureau fixe (33 %, contre 22 %), les personnes ayant un revenu annuel inférieur à 15 000 euros (30 %), celles passant plus d’une heure et demie dans les transports (28 %, contre 21 % chez celles dont le temps de transport est inférieur) et chez les actifs aidants de personnes handicapées ou en perte d’autonomie (28 %, contre 19 % chez ceux qui n’ont pas cette responsabilité).
Hausse des pathologies psychiques
L’étude a cerné les facteurs aggravants : surcharge de travail (24 % des actifs qui déclarent devoir traiter énormément d’informations complexes sont en détresse), organisation physique de l’espace de travail, perte de contrôle du temps et accumulation des préoccupations privées et professionnelles. « Les pathologies mentales liées au travail sont en augmentation constante », indiquent les auteurs de l’étude. Cette inquiétude est confirmée par les chiffres publiés par l’Assurance maladie dans un rapport de janvier 2018. La Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), s’alarmant elle aussi d’une nette augmentation, relevait, pour l’année 2016, plus de 10 000 cas de maladies psychiques (dépressions, troubles anxieux et états de stress post-traumatiques) reconnus comme accidents du travail.