Jusqu’alors, le nombre de décès chaque année en Europe dus à la résistance aux antimicrobiens était évalué à 30 000. D’ici à 2025, 50 000 personnes décéderaient par an en Europe en raison de l’inefficacité des antibiotiques, constate la Société européenne pour la microbiologie clinique et les maladies infectieuses (ESCMID). Un phénomène susceptible de bouleverser notre système de santé.
La lutte contre la montre doit s’engager
Pour enrayer cette invasion de nouvelles bactéries résistantes, en provenance, principalement, de Grèce et d’Afrique du Nord, la principale stratégie consiste à éviter le plus possible leur dissémination, notamment par la mise en place d’une véritable politique de prévention, tout en renforçant les moyens de la recherche. Cela afin de gagner du temps en attendant que de nouveaux traitements antibiotiques soient mis au point et arrivent sur le marché.
La Grèce, l’Espagne et l’Italie sont les pays européens les plus affectés par l’apparition de nouvelles bactéries multirésistantes. « Les bactéries ne respectent pas les frontières entre pays, il est donc fort probable que nous assistions à une propagation de microbes hautement résistants provenant des nations présentant un problème plus grave. Nous avons besoin de stratégies aussi bien européennes qu’internationales ainsi que d’initiatives nationales, car le problème ne restera pas local très longtemps », a commenté Murat Akinova, le président de l’ESCMID. « En France, il serait nécessaire de détecter très tôt les patients porteurs et infectés et de séparer les patients atteints. Afin que nous puissions combattre de manière active les menaces à venir, il est souhaitable que les organismes de santé investissent dans le diagnostic rapide de ces résistances et leur implémentation large afin de contenir autant que possible leur diffusion », déclare Patrice Nordmann, spécialiste ESCMID pour la France et professeur en microbiologie à l’Université de Fribourg.
Une bataille qui s’annonce difficile
Des chercheurs américains qui ont étudié une tribu en pleine forêt amazonienne sont inquiets. Ils se sont aperçus que cette population, les Yanomami, avait développé naturellement une grande résistance aux antibiotiques, y compris aux antibiotiques synthétiques parmi les plus récents. Les résultats de cette étude, publiés dans la revue Science Advances, montrent que les bactéries s’arment naturellement contre des substances toxiques pour elles, avant même d’y avoir été exposées. Les mécanismes de la résistance aux antibiotiques pourraient être encore plus complexes qu’on ne le pensait, et ainsi la lutte contre ceux-ci plus difficile que prévu.