Selon une étude Ifop* pour Jalma, cabinet de conseils spécialisé en santé, publiée dans Les Echos le 18 novembre, 64 % des Français renonceraient à consulter un spécialiste du fait du délai d’attente. C’est la première cause de renoncement aux soins, devant le coût des consultations ou l’éloignement géographique. Une situation qui se dégrade d’année en année, l’enquête ayant comparé les temps d’attente entre 2011, 2012 et 2014. Toutes les spécialités sont touchées : 57 jours de délai pour un rendez-vous chez un gynécologue en 2014 (contre 51 en 2011), 42 jours chez un cardiologue (29 en 2011) et 36 jours chez un ORL (29 en 2011). Les patients se tournent alors vers les praticiens hospitaliers, dont les agendas sont aussi surchargés, comme les cardiologues, qui affichent par exemple un délai d’attente comparable aux cabinets de ville : 42 jours. Pour une consultation en gynécologie, il faut patienter 46 jours, et en oto-rhino-laryngologie, 37 jours.
Vieillissement des médecins comme des patients
Le spécialiste le moins accessible reste l’ophtalmologiste : 111 jours d’attente en libéral (contre 103 en 2011) et 81 jours pour une consultation en secteur hospitalier. « Il y a 5 800 ophtalmologistes en France, c’est insuffisant, car les besoins explosent, souligne Thierry Bour, président du Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof). Nous sommes passés de 12 millions d’actes en 1980 à 37 millions l’année dernière. » La spécialité est pourtant prisée par les étudiants en médecine, mais elle a souffert trop longtemps d’un numerus clausus trop bas. « Résultat : un ophtalmologiste sur deux qui part à la retraite n’est pas remplacé. » Le vieillissement des médecins est général, selon le cabinet Jalma, qui relève un âge moyen de 58 ans. Les patients vieillissent tout autant. « Cela a une incidence sur l’augmentation du nombre de cataractes, de glaucomes et de DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge, NDLR), poursuit Thierry Bour. Et il y a un autre facteur : l’évolution de la médecine et des techniques. Par exemple, il y a dix ans, 95 % des personnes n’étaient pas soignées pour une DMLA. Aujourd’hui, nous savons très bien la traiter, mais cela demande un suivi régulier avec huit à dix injections par an, sans compter les consultations en amont et celles de suivi. »
La féminisation et l’évolution de la profession entrent également en compte. « Les femmes travaillent moins le mercredi et l’ensemble des médecins consultent moins le samedi, pour avoir plus de temps libre eux aussi », constate le cabinet Jalma.