Médecins du Monde a dévoilé, ce lundi 13 juin, une campagne coup de poing pour « dénoncer le prix révoltant des médicaments et alerter sur le risque qu’il fait porter sur notre système de santé ». Dans un communiqué, l’ONG donne plusieurs exemples dont celui du Glivec, un traitement contre la leucémie, « vendu 40 000 euros par an et par patient pour un coût de production estimé à seulement 200 euros ». Elle juge que « les autorités qui fixent le prix d’un médicament acceptent de s’aligner sur les exigences des firmes pharmaceutiques. [Ces dernières] déterminent le prix en fonction de la capacité des Etats à payer pour avoir accès au traitement. Plus un Etat est riche, plus le prix sera élevé ».
Une pétition en ligne
Pour faire entendre sa voix, Médecins du Monde a mis en ligne une pétition* adressée à la ministre de la Santé, Marisol Touraine, et demande « que l’Etat protège l’intérêt des Français, préserve notre système de santé solidaire et intervienne pour faire baisser le prix des médicaments ; la transparence des coûts de recherche et développement ; un modèle alternatif au brevet pour financer l’innovation thérapeutique ».
Cette pétition devait être accompagnée d’un affichage urbain composé de douze visuels portant des messages cyniques autour de la rentabilité des maladies : « Une leucémie, c’est en moyenne 20 000 % de marge brute », « Bien placé, un cancer peut rapporter jusqu’à 120 000 euros » ou encore « Le mélanome, c’est quoi exactement ? C’est 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires ». Or, les diffuseurs ont décliné la demande de l’ONG.
Refus d’affichage
L’afficheur contacté pour cette campagne a en effet sollicité les conseils de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) qui a rendu un avis consultatif. Cette dernière a déclaré avoir rappelé à l’afficheur « les principes généraux liés à l’emploi d’allégation, notamment chiffrées, en publicité, en particulier sur la nécessité que celles-ci soient fondées sur des éléments justificatifs objectifs et vérifiables », et avoir conseillé « d’ajouter les précisions nécessaires sur les études venant à l’appui de ces affirmations ». En guise de conclusion, l’ARPP a indiqué que, « quelle que soit la cause défendue, aussi légitime soit-elle, pour que le citoyen-consommateur puisse se faire une opinion éclairée, il doit pouvoir disposer dès le message des preuves des allégations avancées ». Cet argument a achevé de convaincre les réseaux d’afficheurs, qui n’ont pas relayé la campagne.
Des propos « injurieux » pour les industriels
Face à ce refus, Médecins du Monde, persiste et met en place un « dispositif de guérilla marketing […] avec de l’affichage sauvage, du Web, du social media, mais également une présence dans les grands quotidiens nationaux ». Cette détermination a fait réagir Les Entreprises du médicament (Leem), qui voient dans cette campagne une « propagande mensongère » faite de « propos caricaturaux et outranciers ». Le Leem avance que le prix des médicaments « est fixé par le Comité économique des produits de santé à l’issue de négociations avec les industriels » et que « les industriels ne fixent donc leur prix de façon unilatérale ». Il précise également que le prix « doit prendre en compte non seulement les coûts de recherche des nouveaux médicaments, mais également leur durée de mise au point (11,5 ans en moyenne), ainsi que les risques qui s’attachent à leur développement (seuls 7% des médicaments entrant dans un essai clinique de phase 1 accéderont au marché) ». Enfin, le Leem affirme que « le secteur pharmaceutique est l’un de ceux qui investissent le plus dans les activités de R&D, avec un taux moyen de 15 % du chiffre d’affaires. Ce taux s’élève souvent au-delà de 30 % pour les entreprises les plus innovantes ».