Chaque année, en France, plusieurs millions de personnes sont exposées, au travail ou dans leur quotidien, à des nuisances sonores si importantes qu’elles affectent leur bien-être et leur santé. La somme annoncée laisse perplexe : 57 milliards d’euros, c’est la traduction chiffrée des conséquences sanitaires et sociales de la pollution sonore, selon le rapport présenté le 14 juin par Christophe Bouillon, président du Conseil national du bruit, dans les locaux de l’Assemblée nationale.
Ce rapport, qui fixe pour la première fois en France le coût social du bruit, passe en revue les différentes sources de nuisances sonores et les classe selon leur impact sanitaire et économique. Pour cela, le cabinet EY (anciennement Ernst & Young), qui a mené l’étude, a analysé « tous les travaux disponibles à l’échelle française et européenne : études scientifiques, études technico-économiques, enquêtes et sondages auprès des populations, articles de presse… ».
Neuf millions de Français souffrent du bruit des transports
Le coût généré par bruit des transports, routiers mais aussi aériens, arrive en tête du classement avec un montant estimé à 20,6 milliards d’euros. Ce chiffre, pourtant élevé, ne prend en compte « que l’exposition des personnes à leur domicile, et [considère] les impacts en matière de troubles du sommeil, de gêne, de risques cardiovasculaires accrus, de décotes immobilières, de perte de productivité et de troubles de l’apprentissage », précisent les auteurs. En France, 9 millions de personnes voient leur santé affectée par des bruits liés aux transports, dont le niveau sonore dépasse les 65 décibels (dB). Plus globalement, 20,5 millions sont gênés par les émissions sonores de plus de 45 dB dues aux transports. Sans surprise, les poids lourds et les utilitaires apparaissent comme les plus bruyants des véhicules routiers. Le transport routier représente à lui seul 89 % des 11,5 milliards d’euros évalués en termes d’impact direct sur la santé, contre 9 % pour le trafic ferroviaire et 2 % pour le trafic aérien.
Une gêne en milieu professionnel et scolaire
L’étude rapporte que « les accidents du travail et la surdité provoqués par le bruit en milieu professionnel coûtent chaque année de l’ordre de 1,2 milliard d’euros ». Quant à l’impact économique du bruit, si l’on conçoit aisément qu’il peut nuire à la productivité, il est cependant plus difficile à quantifier. Selon les auteurs de l’étude, il pourrait se chiffrer à 18 milliards d’euros par an.
Les travailleurs ne sont pas les seuls concernés. Dans les écoles, où le nombre de décibels grimpe rapidement, le bruit a des répercussions sur la réussite des élèves. Les nuisances sonores seraient responsables de 20 % des décrochages scolaires. D’après l’étude, « le coût social du bruit en salle de classe serait de l’ordre de 6 milliards d’euros par an ».
Ces « chers » voisins
Pour un grand nombre de Français, les nuisances sonores occasionnées par leurs voisins viennent largement concurrencer celles causées par les transports. Là aussi, cette gêne entraîne des troubles du sommeil et des maladies cardiovasculaires. Le coût social des bruits de voisinage s’élèverait 11,5 milliards d’euros chaque année.
Ces pollutions sonores, qui coûtent cher à la société tant du point de vue sanitaire qu’économique (décote des biens immobiliers, perte de productivité…), sont néanmoins sous-estimées, selon les auteurs de l’étude. Ces derniers soulignent que le chiffre de 57 milliards d’euros, qui représente déjà 3 % du PIB en 2016, « est susceptible d’évoluer à la hausse ».