Un plan de lutte contre la prostitution des mineurs

, par  Isabelle Coston

Le gouvernement a décidé de s’attaquer à un phénomène caché et en pleine expansion en France : la prostitution des mineurs, qui touche des filles dès l’âge de 14 ans.

En lançant pour la première fois un plan interministériel de lutte contre la prostitution des mineurs, doté de 14 millions d’euros et mis en œuvre au cours des neuf prochains mois, le gouvernement souhaite « comprendre », « prévenir » et « combattre […] un phénomène grandissant que la société ne peut plus ignorer » et qui concernerait aujourd’hui en France entre 7 000 et 10 000 personnes, principalement des jeunes filles.
Cette prostitution des mineurs est constatée partout sur le territoire et dans tous les milieux sociaux. Elle touche surtout des jeunes filles, âgées de 15 à 17 ans, avec un point d’entrée dans la prostitution de plus en plus tôt, se situant entre 14 et 15 ans pour plus de la moitié d’entre elles. La plupart ont déjà été victimes ou confrontées à de la violence, notamment intrafamiliale, avant d’entrer dans le système prostitutionnel.

Mieux repérer et accompagner les victimes

L’élément déclencheur peut être une fugue, pendant laquelle l’ado a besoin d’un hébergement, d’argent et fait de mauvaises rencontres. Parfois c’est un petit ami qui devient proxénète et envoie des clients à sa copine. Cela peut aussi commencer par des « nudes » (photo de soi dénudé) publiés sur les réseaux sociaux qui en font la cible d’un maître chanteur.
Le premier objectif est de mieux repérer les enfants victimes. Une tâche ardue, étant donné que beaucoup d’entre elles ne se considèrent pas comme des victimes et trouvent leur conduite banale, voire positive, puisqu’elle leur permet, entre autres, de gagner rapidement de l’argent. « Ces mineurs valorisent les nombreux effets bénéfiques de leur pratique : autonomie financière, réponse aux besoins fondamentaux d’affection et d’attention, sentiment de reprendre le contrôle de sa vie, impression d’appartenir à un groupe », détaille le gouvernement, qui alerte sur le fait qu’ils « se trouvent pourtant en danger, tant physiquement que psychologiquement ». C’est la raison pour laquelle ce plan, comportant plusieurs volets, prévoit ensuite un accompagnement « dans une reconstruction de leur parcours de vie ».

Réprimer clients et proxénètes

La prostitution des enfants est évidemment interdite par la loi, mais le nombre de poursuites reste faible au regard de l’ampleur du phénomène. Aussi, le dernier volet du plan envisage de « poursuivre et réprimer plus efficacement » clients et proxénètes. La désignation d’un magistrat référent au sein de chaque parquet est donc prévue, ainsi que l’inscription, dans le Code de l’action sociale et des familles, du fait que la prostitution place le mineur en situation de danger et l’inscrit dans le champ de la protection de l’enfance.

Une mobilisation collective

Pour combattre ce fléau et bâtir ce plan, le premier du genre, Adrien Taquet, secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles, a travaillé en concertation avec Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, Nadia Hai, ministre déléguée chargée de la Ville, Élisabeth Moreno, secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État chargée du Tourisme, et Cédric O, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique. Ils se sont appuyés sur le rapport d’un groupe de travail, présidé par Catherine Champrenault, procureure générale près de la cour d’appel de Paris. Plusieurs actions pourront ainsi être menées conjointement, car les mesures préconisées dans le rapport portent à la fois sur la prévention et le repérage des conduites prostitutionnelles, l’accompagnement des personnes concernées et l’amélioration de la réponse pénale. Une campagne de sensibilisation à destination du grand public, y compris sur les réseaux sociaux, sera notamment lancée durant le premier semestre 2022.

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