Aujourd’hui, « plus d’un malade sur deux » guérit du cancer, a rappelé François Hollande, mardi 4 février, lors de la présentation du troisième Plan cancer. Si les progrès thérapeutiques ont permis d’améliorer l’espérance de vie des patients, une attention particulière doit être portée aux conséquences de la maladie sur la sphère privée des anciens malades. Le retour de ces derniers à la vie normale, le plus souvent après des traitements longs et douloureux, est en effet souvent vécu comme un second combat, avec en toile de fond la crainte d’une rechute toujours possible. Afin de préserver l’autonomie et la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer pendant, mais aussi après la maladie, le président a annoncé une série de mesures pour faciliter le retour au travail des salariés, ainsi que l’accès aux prêts bancaires et aux contrats d’assurances.
Huit salariés sur dix retravaillent après un cancer
Actuellement, huit salariés sur dix retravaillent après un cancer ; ils sont toutefois 30 % à avoir perdu leur emploi deux ans après le diagnostic. Les difficultés auxquelles sont confrontés ceux qui sont sortis, du moins temporairement, de la maladie sont nombreuses et peuvent même, dans certains cas, conduire à la dépression : perte de l’estime de soi et peur de la récidive sont « autant d’incertitudes qui compliquent une projection dans l’avenir et la réintégration socioprofessionnelle », constatait l’Institut Curie dans une note consacrée à l’après-cancer, en 2011. D’autant plus que, la plupart du temps, une fois que le patient est de retour au travail, ses collègues et sa hiérarchie ont tendance à considérer que « tout va bien » alors que ce n’est pas forcément le cas. Par exemple, 61 % des anciens malades se déclarent plus fatigables qu’avant et 33 % signalent des troubles de la mémoire et de la concentration. Pour améliorer les choses, le nouveau Plan prévoit donc de renforcer les droits de ces salariés en matière d’aménagement du temps de travail et de formation professionnelle. Concrètement, dès 2015, les personnes qui auront travaillé 150 heures dans le trimestre auront droit aux indemnités journalières de remplacement, contre 200 heures actuellement. Les entreprises devraient en outre être sensibilisées aux risques de discrimination dont pourraient faire l’objet les victimes de cancer.
Un « droit à l’oubli »
Autre obstacle pour le retour des anciens malades à la vie normale : les difficultés d’accès aux prêts bancaires et à l’assurance. En 2007, la convention Aeras, signée entre l’Etat, les fédérations professionnelles des secteurs de la banque et de l’assurance et les associations de consommateurs, prévoyait pourtant de limiter les exclusions des anciens malades et des patients en affection de longue durée (ALD) et de réduire les surprimes. Elle reste cependant encore mal connue du grand public et peu appliquée. L’enjeu est, compte tenu des progrès thérapeutiques, « de faire évoluer l’appréciation du risque par les assureurs pour les personnes ayant été atteintes d’un cancer », ajoute le texte. Le président souhaite donc introduire une notion de droit à l’oubli dans cette convention, c’est-à-dire un délai au-delà duquel les demandeurs d’assurance ayant eu un cancer n’auront plus à le déclarer. C’est l’Institut national du cancer (Inca) qui sera chargé de préciser les cancers concernés, sur la base « des délais de récidive, des probabilités de survie avec ou sans incapacité de guérison ». La convention Aeras devra être renégociée d’ici dix-huit mois. Si cette disposition aboutit, il s’agira d’une grande évolution pour de nombreux anciens malades. François Hollande a déjà indiqué qu’il l’imposerait par la loi si la négociation échoue.