Les recommandations émises en juin par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) ont été suivies à la lettre par le gouvernement. Depuis le 1er janvier, des distances minimales de cinq mètres pour les cultures basses (céréales, maïs…) et de dix mètres pour les cultures hautes (arboriculture, vignes, arbres et arbustes, forêt…) doivent être respectées par les agriculteurs qui épandent des produits sanitaires à proximité des habitations. Une distance de vingt mètres incompressibles est en outre imposée pour les substances particulièrement préoccupantes, c’est-à-dire les produits les plus toxiques qui représentent 0,3 % des épandages. A noter que le glyphosate, qui avait conduit ces derniers mois plusieurs maires à prendre des arrêtés d’interdiction d’épandage près des lieux de vie, n’en fait pas partie.
Distances adaptables localement
Les distances de cinq et dix mètres pourront quant à elles être réduites et adaptées localement — excepté près d’établissements spécifiques comme les écoles ou les maisons de retraite —, « dans le cadre de chartes d’engagement élaborées à l’échelon départemental, entre les utilisateurs des produits, les riverains et les élus », précise le ministère de la Transition écologique et solidaire.
Si la France fait partie des premiers pays européens à mettre en place ce type de mesure, les distances de sécurité retenues restent néanmoins très éloignées des 150 mètres réclamés par les associations de protection de l’environnement et certains maires. L’ONG Générations futures dénonce, à travers la voix de son directeur François Veillerette, « le manque total d’ambition de ces textes qui ne changeront rien sur le terrain et ne protégeront nullement les riverains des zones d’utilisation de pesticides ».
« Limite politique »
Même son de cloche avec l’association Agir pour l’environnement. D’après elle, la distance de protection n’est qu’une simple « limite politique » ne mettant « absolument pas » à l’abri les populations voisines. L’association a d’ailleurs annoncé qu’elle contesterait prochainement cette nouvelle réglementation devant la justice.
Enfin, la Fondation Nicolas Hulot regrette que les décisions gouvernementales ne « répondent pas aux enjeux croissant de santé publique et de protection de l’environnement ».
Du côté des agriculteurs, le mécontentement est également important. Même si une enveloppe de 25 millions d’euros est prévue pour les accompagner vers une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires et que les parcelles déjà semées ne seront concernées qu’au 1er juillet prochain, ils redoutent une baisse de leurs revenus. « En instaurant, dans certaines situations, des distances de sécurité incompressibles, quelles que soient les pratiques et les mesures de protection, le gouvernement laisse place à l’idéologie et abandonne de nombreux agriculteurs sans aucune solution », estime la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA).