S’exprimant lors d’une visite à l’Institut Pasteur, à Paris, le 18 novembre, à l’occasion de la Journée européenne de sensibilisation au bon usage des antibiotiques, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, accompagnée du ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a annoncé une série de mesures actées ou en projet pour lutter contre l’antibiorésistance. « Il y a urgence : l’une des avancées scientifiques majeures du
En finir avec la surconsommation
Première cible des mesures annoncées, la surconsommation d’antibiotiques place la France à la troisième place des plus gros consommateurs de l’Union européenne : leur utilisation est supérieure de 30 % à la moyenne des pays de la zone. La dynamique positive de la campagne lancée en 2002, « Les antibiotiques, c’est pas automatique », s’essouffle, après avoir permis d’éviter 40 millions de prescriptions. La consommation d’antibiotiques en médecine de ville a en effet augmenté de 3 % entre 2007 et 2012, et la tendance semble se confirmer en 2013. Pour informer à nouveau sur les risques, le gouvernement prévoit de créer un indicateur hospitalier de suivi de l’exposition aux antibiotiques (ICATB 2) et a annoncé une nouvelle campagne de sensibilisation sur Internet, orchestrée par la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam).
Alors, quand les antibiotiques sont-ils vraiment nécessaires ? Pour le déterminer, la ministre de la Santé souhaite développer, dans les cabinets médicaux comme en pharmacie, les tests rapides d’orientation diagnostique (Trod), qui permettent de déterminer si une maladie est d’origine bactérienne ou virale, et rendre plus facile leur utilisation. L’objectif est de parvenir à « une réduction importante des prescriptions inappropriées ». Encore faut-il que les Français, viscéralement attachés à leurs antibiotiques, en fassent un meilleur usage : 20 % des médicaments dormant dans les placards, c’est-à-dire des médicaments remboursés mais non consommés, sont des antibiotiques.
Limiter la prescription et la délivrance
D’où l’idée proposée par Marisol Touraine, et qui fait grincer des dents les pharmaciens, de vendre certains antibiotiques à l’unité dans les officines. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2014 prévoit trois années d’expérimentation dans 22 000 pharmacies volontaires, dont 200 à 300 dès 2014. Sont concernés les [antibiotiques considérés comme critiques->http://pourquoi-docteur.nouvelobs.com/Antibiotiques---le-gouvernement-s-attaque-aux-resistances-4342.html, à préserver des résistances pour pouvoir y avoir recours dans les situations graves. Il s’agit des fluoroquinolones, des céphalosporines de troisième et quatrième générations et de l’association amoxicilline-acide clavulanique, connue sous le nom d’Augmentin, pour lesquels la piste d’une délivrance uniquement à l’hôpital est aussi à l’étude. D’autres mesures sont prévues pour limiter la prescription et la délivrance de certains antibiotiques les plus générateurs de résistance : des durées de prescription réduites au strict minimum ou encore la création d’un référent hospitalier sur les antibiotiques dans tous les établissements, y compris les maisons de retraite. Et pour inciter au développement de nouveaux produits, la ministre propose de créer un statut inspiré des médicaments orphelins. Cette mesure devrait aussi favoriser le maintien sur le marché des « vieux » antibiotiques.
Inclure la santé animale dans la prévention
Du côté de la santé animale, le tableau est semblable, avec une consommation d’antibiotiques plus importante en France que dans les autres pays européens, même si elle a diminué de 33% ces cinq dernières années. D’où la volonté du gouvernement d’apporter une réponse à la surconsommation qui inclus les animaux, bien qu’il ait dû renoncer au retrait de la vente des antibiotiques par les vétérinaires : opposés à la mesure, ces derniers s’étaient mis en grève le 6 novembre. Ce marché pèse tout de même près de près de 2 milliards d’euros en France.