Al’heure où vous lirez ces lignes, l’année 2016 commencera. Il m’appartient donc de vous souhaiter à toutes et à tous, au nom des membres du conseil d’administration et de son bureau, une excellente santé pour vous-mêmes et vos proches.
Profitez bien de l’année 2016. L’année suivante sera tellement bouleversée par les annonces qui vous sont faites chaque jour qu’il est difficile de vous préciser celles qui ne seront visibles qu’en 2017, voire en 2023.
Le début de cet article va vous donner de bonnes nouvelles, puisqu’elles sont communiquées par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans son Panorama de santé 2015.
• Le système de santé français est « très bon » ; il était le meilleur en 2000.
• L’espérance de vie en France est de 82,3 ans en moyenne, contre 80,5 ans dans les autres pays comparés.
• Les Français n’abusent pas des antidépresseurs, contrairement à une idée répandue selon laquelle ils en seraient les premiers consommateurs au monde. En réalité, ils ne se classent qu’au douzième rang.
D’importantes marges de progrès existent cependant, dans les comptes de la Sécurité sociale notamment : la France consacre 11 % de son PIB aux dépenses de santé, contre 8,9 % en moyenne pour les pays de l’OCDE, et depuis quatorze ans la branche maladie de notre système de santé est déficitaire.
Finalement, nous ne sommes pas si mauvais élèves, puisque la France se classe sixième.
Tout cela énoncé, les patients français ne prennent réellement en charge que 7 % de leurs dépenses totales de santé, contre 20 % en moyenne dans les pays de l’OCDE, soit le taux le plus faible de toute la zone. Merci à notre bonne vieille septuagénaire qu’est la Sécurité sociale.
Réglementation et démutualisation
Puisque nous ne passons pas notre vie à profiter des statistiques bienveillantes, je souhaite que l’actualité sur la santé ou la prise en charge de vos parents ou ascendants ne constitue pas votre quotidien, sinon il y aurait de quoi y perdre votre latin tant la situation devient complexe.
De belles idées qui génèrent des « usines à gaz » à l’efficacité incertaine
Cela est tout particulièrement dû à des annonces jamais vraiment étayées par des faits intangibles et donc toujours susceptibles d’être modifiées ou annulées. Tant que les annonces seront faites avant des études correctement et complètement menées, il en sera ainsi.
Il est, évidemment, toujours question d’améliorer la situation des Français, et il ne faudrait pas aller bien loin dans les déclarations tant du président de la République que dans celles de la ministre de la Santé pour trouver des incantations sur l’immobilisme des Français, le souhait de voir une simplification radicale de notre système de soins… devenant immédiatement la cause de tous les maux.
Malheureusement, toutes ces annonces ne sont qu’un prélude à la génération d’« usines à gaz » chaque jour plus illisibles et incompréhensibles par tous.
Notre problème, à nous, mutualistes, est de constater, après l’annonce de belles idées, que des Français renoncent à des soins, que la mutualisation n’existe plus que dans la tête de quelques-uns, ou plutôt que la « démutualisation » s’opère à grande vitesse, par exemple lorsque les salariés actifs se voient offrir une couverture santé différente selon les vues et les désirs des uns ou des autres.
A terme, il est à craindre une « parcellisation » des populations couvertes ou non, ce qui nuira bien sûr à leur couverture individuelle.
Les actifs
Depuis maintenant quelques années, vous entendez parler de l’accord national interprofessionnel (ANI) devant permettre à tous les salariés actifs de bénéficier d’une complémentaire santé, dont au moins 50 % de la cotisation doit être prise en charge par leur entreprise.
Là encore, la taille de l’entreprise est prépondérante pour la mise en œuvre de ce processus, la tentation étant d’offrir au collaborateur (et pas à sa famille) une « couverture de base » à un « tarif de base ». La démutualisation est toujours en marche… Il est alors bien tentant de se limiter à cette couverture de base, le collaborateur devant souscrire des offres optionnelles pour bénéficier d’une couverture raisonnable pour lui-même, son conjoint et ses enfants.
Rien n’est encore fait pour que l’ANI soit mis en œuvre dans toutes les entreprises au 1er janvier 2016. D’ailleurs, des sanctions sont-elles prévues en cas de non-respect de cette obligation ?
Sa généralisation sera-t-elle suffisante pour réduire le nombre de personnes en France qui n’ont pas de complémentaire santé ? Certainement pas. Restent : les jeunes, les personnes âgées, les précaires…
Les seniors
Depuis notre assemblée générale, vous n’entendez plus parler que de l’avenir de la généralisation de l’accès à la complémentaire santé pour les seniors, à partir de 2017-2018.
La Mutualité française a des idées, le président de la République aussi, et ce ne sont pas les mêmes. Quel dommage que toutes ces annonces soient faites sans aucune concertation ni information sur les moyens d’y parvenir et de les financer.
Les seniors sont-ils tous soumis aux mêmes contraintes ? Absolument pas, dans la mesure où certains d’entre eux avaient une couverture individuelle, d’autres, les conditions de l’époque où ils ont quitté l’entreprise, et maintenant, les conditions prévues pour leur sortie de l’entreprise.
Depuis la mise en œuvre de la loi Evin, si le salarié bénéficiait d’un contrat collectif obligatoire, l’assureur concerné doit offrir au désormais retraité les mêmes prestations que précédemment, avec une cotisation moyenne pouvant être augmentée et plafonnée à 50 %, le président de la République souhaitant que cette augmentation soit lissée dans le temps.
Cela permet aujourd’hui à certains « visionnaires » de dire que la cotisation d’un retraité peut être trois ou quatre fois supérieure à celle dont il bénéficiait lorsqu’il était actif, ce qui est bien entendu, extrêmement lié à la participation que prenait en charge l’entreprise.
A ce jour, sur ce sujet, les idées gouvernementales sur les propositions à faire aux plus de 65 ans sont reçues très fraîchement par les organismes complémentaires hostiles à ce projet.
Alors, adaptation de la loi Evin, multiplication des offres aux seniors, baisse de la couverture proposée, normalisation, uniformisation ?
Je suis intimement persuadé qu’il y a limite à tout régenter au mépris de la liberté et des choix de vie, même s’il faudrait se demander dans quelle mesure chacun peut faire ce qui lui convient avec pour corollaire qu’il soit couvert par le collectif.
En tout état de cause, vous avez là une des raisons qui ont conduit, par prudence, votre conseil d’administration à prévoir une augmentation de vos cotisations de 1 % au 1er janvier 2016 sur les contrats mutualisés.
Voilà encore un plat de résistance qui sera difficile à avaler dans les toutes prochaines années.
Espérant ne pas vous avoir occasionné une indigestion, je vous renouvelle mes meilleurs souhaits pour cette nouvelle année, qui nous apportera, n’en doutons pas, d’autres belles idées et simplifications.
Georges Renouard, président MIP