Selon une étude menée en Suisse et publiée le 28 mai 2019 dans la revue Proceedings of the national Academy of sciences (PNAS), le développement du cerveau des grands prématurés pourrait être stimulé grâce à de l’écoute musicale.
Les nourrissons nés bien avant le terme peuvent être affectés de troubles neurologiques, leur cerveau ainsi que d’autres organes vitaux tels que les poumons, le tube digestif ou encore le canal artériel n’ayant pas pu achever leur croissance in utero. Les séquelles cérébrales peuvent avoir pour conséquences des retards dans l’apprentissage, des problèmes de concentration, voire des difficultés pour gérer les émotions. Pour contrer cela, les chercheurs ont testé les effets de musiques douces (harpe, flûte…) sur le développement cérébral d’une quarantaine de prématurés hospitalisés dans l’unité de néonatologie des hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Ils leur ont fait écouter trois environnements sonores différents de huit minutes chacun, composés spécialement par un musicien zurichois, qui venaient rythmer différents moments de la journée : les réveils, les phases d’éveil et l’endormissement. « Ces paysages musicaux ont été construits sur la base de centaines de sons permettant une relaxation profonde, explique Andreas Vollenweider, le compositeur dans les colonnes du Monde. Des artefacts acoustiques ont ensuite été ajoutés pour stimuler leur activité cérébrale, comme le son de la harpe, des clochettes et du punji (la flûte indienne des charmeurs de serpents), qui est l’instrument ayant engendré le plus de réactions chez les tout-petits lorsque nous avons fait des tests préalables. »
Des bébés moins stressés
L’idée de faire écouter des mélodies aux bébés est tout d’abord née du constat que les bruits de l’hôpital et les soins intempestifs généraient du stress et nuisaient au bon développement de leur cerveau. Pour se développer correctement, les tout-petits ont notamment besoin d’avoir un sommeil apaisé, au cours duquel les connections neuronales s’effectuent. « Les déficits neuronaux des grands prématurés sont en partie dus à l’environnement stressant des soins intensifs, déclare en effet dans le journal Lara Lordier, docteur en neurosciences aux HUG et à l’université de Genève et première auteur de l’étude. Ces bébés sont souvent confrontés à des sollicitations inattendues, parfois sans lien avec des événements les concernant, ce qui rend plus difficile le fait de leur attribuer un sens. D’un autre côté, ils peuvent également manquer de stimulations agréables et structurantes. »
Une meilleure maturation du cerveau
Les effets de la musique sur les réseaux neuronaux de ces grands prématurés ont dépassé les attentes des chercheurs. Ils ont observé grâce à des examens réalisés par IRM fonctionnelle au repos que les bébés ayant participé aux tests présentaient un développement cérébral comparable à celui d’enfants nés à terme. « Même si les résultats de nos travaux nécessitent d’être affinés, cela nous démontre qu’il est possible, grâce à la régulation exercée par la musique, de diminuer les effets délétères des facteurs environnementaux sur le développement fonctionnel du cerveau », conclut la professeur Petra Hüppi, médecin-chef du service de développement et croissance des HUG, qui a supervisé les travaux.
Vous pouvez entendre des extraits des musiques diffusées aux bébés dans cette vidéo.