Il y a de quoi en perdre son latin. Cela fait plusieurs mois, voire plusieurs années, que les pouvoirs publics répètent inlassablement qu’entre un médicament original (princeps) et sa copie (générique) il n’y a absolument aucune différence, hormis le prix : les génériques coûtent beaucoup moins cher. En juillet 2012, l’Assurance maladie a même mis en place la règle « tiers payant contre générique » : pour avoir le médicament princeps, il faut désormais faire l’avance des frais.
Seulement voilà, de plus en plus de médecins font entendre un son de cloche différent. Selon eux, les génériques ne sont pas aussi efficaces que les originaux. Ils engendrent parfois des effets secondaires inattendus. La différence de dosage de la molécule, par exemple, même si elle varie très légèrement, peut jouer un rôle important dans des maladies où le médicament sert d’ajustement thérapeutique (diabète, hypertension artérielle, épilepsie, etc.). Toutes ces critiques ont été compilées par le docteur Sauveur Boukris dans un livre intitulé Médicaments génériques : la grande arnaque, paru le 10 avril.
Des origines moins contrôlées
Si jusqu’à présent les critiques faites aux génériques provenaient surtout des médecins généralistes, ces derniers ont été rejoints par des diabétologues, des endocrinologues, des neurologues. Même l’Académie de médecine y va de sa petite précision. Elle a tenu à rappeler, dans un rapport, que « la bioéquivalence entre produit référent et générique ne signifie pas qu’il y a automatiquement une équivalence thérapeutique », comme l’a noté l’hebdomadaire L’Express, qui a réalisé un dossier complet sur le sujet et publié les bonnes feuilles du livre du docteur Boukris.
Ce dernier y évoque également le manque de contrôle sur les matières premières dans les pays étrangers d’où celles-ci sont extraites. Elles sont pourtant souvent moins pures que celles utilisées pour les médicaments référents. Or ce sont ces matières qui servent à la fabrication de la molécule aux effets soignants.
De coûteuses économies
Ce flot de critiques sème un véritable doute, tant dans la tête des consommateurs, que chez les autorités sanitaires, car les génériques constituent une véritable alternative au coût élevé du remboursement des médicaments, selon l’Assurance maladie. Cependant, même avec cette affirmation, le docteur Sauveur Boukris est en désaccord. Bien entendu les copies sont plus économiques que les originaux, mais la mise en place des campagnes de promotion de ces génériques a été coûteuse pour la Sécurité sociale. De la même manière, l’auteur évoque le dispositif « tiers payant contre générique », qui permet aux pharmaciens de recevoir une prime pour compenser le manque à gagner lorsqu’ils ont vendu des médicaments moins chers. « L’addition sera salée », souligne L’Express, qui estime le coût de cette opération à 240 millions d’euros, sortis tout droit des caisses de l’Assurance maladie.
Depuis la médiatisation de ces critiques contre les génériques, la Fédération nationale de la Mutualité française, qui regroupe un nombre important de mutuelles, ne s’est pas exprimée sur le sujet. Ayant pour rôle de rembourser le reste à charge de leurs adhérents, les mutuelles sont pourtant directement concernées.