La première cigarette, le premier verre d’alcool, le premier joint… : l’adolescence, c’est le temps des premières fois, mais est-ce que les jeunes ont conscience de la dangerosité de ces produits ? Pour mieux les informer et les aider, des consultations jeunes consommateurs (CJC) ont été créées il y a une dizaine d’années. Il en existe près de quatre cents, réparties sur tout le territoire. Dans chacune, les 12-25 ans et leurs parents peuvent rencontrer une équipe de professionnels de l’addiction et de l’adolescence (médecins, psychologues, éducateurs), de manière gratuite et anonyme. Lors du premier entretien, un membre de l’équipe fera le point avec le jeune afin d’évaluer sa consommation réelle, puis lui proposera, s’il n’est pas encore dépendant, un suivi personnalisé avec cinq ou six rendez-vous, tandis que les jeunes « accros » se verront, eux, réorientés vers d’autres structures comme les centres de soins. L’objectif de ces consultations est vraiment d’agir avant qu’une addiction ne s’installe, « car plus tôt le jeune est pris en charge, plus il aura de chance de ne pas devenir dépendant », souligne Christine Tellier, responsable des trois CJC du Loiret, directrice de l’Association pour l’écoute et l’accueil en addictologie et toxicomanie (Apleat) et membre du bureau de la Fédération addiction.
Informer le plus tôt possible
Faire de la prévention est donc le mot d’ordre. Pour cela, les équipes des CJC se déplacent également dans les lycées et les centres de formation d’apprentis. Ils forment aussi les professionnels éducatifs comme les CPE ou encore les professeurs en contact quotidien avec ces jeunes qui tentent différentes expériences. En 2011, 42 % des jeunes de 17 ans affirmaient avoir expérimenté le cannabis, 42 % avoir consommé du tabac au cours du mois passé et 53 % avoir bu au moins cinq verres en une occasion au cours du mois passé, selon les chiffres de la dernière Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la Défense (Escapad), réalisée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT).
Eviter les addictions
La consommation régulière n’est pas quelque chose d’anodin. La substance la plus addictive serait le tabac, selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), avec 32 % des consommateurs dépendants (tous âges confondus), suivi de l’héroïne (23 %), de la cocaïne (17 %) et de l’alcool (15 %). Selon l’institut, les dépendances au tabac, à l’héroïne et à la cocaïne peuvent se développer en quelques semaines, alors que celle à l’alcool est beaucoup plus lente. La première expérience se fait souvent par mimétisme – « un copain le fait » –, mais certains y prennent goût par pur plaisir ou dans le but de se détendre, car ils vivent une situation familiale compliquée (divorce) ou ont un problème plus personnel. « Il y a aussi la pression, dénonce Christine Tellier. Il faut aujourd’hui être beau, être réactif et être bon à l’école. » Et les conséquences de ces drogues sur la santé sont nombreuses, avec l’apparition de troubles du comportement, de la mémoire ou de l’attention qui augmentent le risque d’accident, l’échec scolaire, la perte de motivation, etc. « Quand les ados ont conscience des effets négatifs, précise-t-elle, ils apprennent à contrôler leur consommation, voire à s’arrêter. »
La place primordiale des parents
« Les parents viennent souvent trop tard aux CJC, car il ne faut pas attendre d’être dans une impasse pour nous contacter, conseille Christine Tellier, qui ajoute : « En ce moment, il y a une forte inquiétude des parents par rapport aux écrans (jeux vidéo). Ils nous demandent ce qu’ils doivent faire, comment réagir, combien de temps laisser leur enfant jouer ?… Ils se sentent démunis. » A la CJC, les parents seront écoutés et aidés afin de trouver les mots pour en parler avec leur adolescent. La pratique addictive est souvent source de conflits entre les parents et leur enfant, c’est pourquoi l’équipe de la CJC essaie de rétablir le dialogue entre les deux générations. « Grâce à une médiation, le jeune a plus de chances de réussir à diminuer, voire à arrêter sa consommation, conclut Christine Tellier. Le principal facteur de protection pour éviter une conduite addictive, ce sont les parents. »