La dixième édition du baromètre Ipsos-Secours populaire sur la précarité en France, publié le mardi 6 septembre, met l’accent sur la question de la santé et révèle des chiffres inquiétants. Parmi les Français les plus pauvres (ceux qui appartiennent à un ménage dont le revenu mensuel net est inférieur à 1 200 euros), la moitié a déjà renoncé ou repoussé une consultation chez le dentiste, soit un bond de 22 points par rapport à 2008. Ils sont également 42 % à avoir décalé ou annulé l’achat de lunettes ou de lentilles de contact (+ 5 points), 40 % une consultation chez un médecin spécialiste (+ 3 points) et 39 % l’achat de prothèses dentaires (+ 1 point) ou une consultation chez l’ophtalmologiste (+ 9 points).
Par ailleurs, 36 % des Français indiquent avoir eu des difficultés au moment de payer des actes médicaux mal remboursés par la Sécurité sociale. Cette proportion grimpe à 64 % pour les foyers les plus pauvres. De plus, il est financièrement compliqué pour près de la moitié des ménages les plus modestes de disposer d’une mutuelle santé (53 %) ou d’avoir une alimentation saine (48 %).
Les enfants aussi sont concernés
Même si les familles donnent clairement la priorité aux soins apportés à leurs enfants, l’enquête montre que les plus jeunes ne sont pas épargnés par les difficultés. Ainsi, 12 % des parents interrogés ont renoncé ou retardé des soins dentaires pour leurs enfants et 10 % ont fait de même pour les soins optiques. Chez les ménages les plus modestes, les pourcentages montent respectivement à 32 % et à 17 %. « Il ne faut pourtant pas oublier les parents, car, souvent, en donnant la priorité [aux enfants], ce sont les parents qui mettent leur santé entre parenthèses, voire en danger », rappelle le Secours populaire.
Sur l’ensemble des Français interrogés, 68 % pensent que les inégalités en matière d’accès à la santé se sont aggravées au cours des dernières années. Les plus convaincus par cette affirmation sont les ruraux (73 %), alors que les Franciliens sont les plus nombreux à penser que les écarts se sont réduits (35 %).
La menace de la pauvreté
Plus généralement, les Français estiment que le risque de pauvreté est de plus en plus important. En effet, plus d’un sur deux (55 %) juge que sa vie quotidienne est menacée par la pauvreté. C’est un peu moins que l’année dernière, mais tout de même 10 points de plus qu’en 2007, avant la crise économique. Cette crainte reste particulièrement forte chez les catégories populaires (92 % des employés et des ouvriers). Le baromètre montre également que plus d’un tiers des Français a déjà connu une situation de pauvreté. Cette proportion a augmenté de 3 points par rapport à 2015. « Comme le pointait déjà le baromètre Ipsos-SPF en 2013, les femmes sont souvent les plus affectées (c’est le cas pour 39 % d’entre elles). Emplois précaires, temps partiel subi, chômage : ces dernières paient un lourd tribut à la crise, mais aussi aux persistantes inégalités de genre. Les ouvriers et employés comptent aussi parmi la catégorie la plus exposée », note l’association. Les Français sont 83 % à penser que les risques que leurs enfants connaissent une situation de pauvreté sont plus élevés que pour leur génération.