Il faudrait avoir vécu sur Mars ces dix dernières années pour ne jamais avoir entendu le slogan « Les antibiotiques, ce n’est pas automatique ! ». Ce message de prévention avait un objectif précis : faire comprendre aux Français et à leurs médecins que le recours systématique aux antibiotiques était nocif. Pourquoi ? Simplement parce que les maladies infectieuses sont capables de s’adapter au point de pouvoir résister à cette forme de traitement.
Un marché trop difficile
Le pendant de ce discours préventif, c’est que les industries pharmaceutiques délaissent désormais un marché qu’ils jugent trop difficile. A ce jour, « le nombre de nouveaux antibiotiques est en chute libre », résument Les Echos. Les industriels mettent en avant un secteur peu rémunérateur, dans lequel les nouvelles molécules sont difficiles à trouver et qui demande beaucoup d’investissement en termes de recherche scientifique. A cela s’ajoute que, lorsqu’un nouvel antibiotique arrive sur le marché, son emploi est restreint, justement pour éviter l’apparition de résistances. Conséquence : le retour sur investissement met du temps à se faire.
Par ailleurs, les exigences sur les essais cliniques ne sont pas adaptées aux spécificités des antibiotiques. Il est impossible, par exemple, de prouver l’efficacité d’une molécule avant sa mise sur le marché. Pour cela, il faudrait en effet la tester sur un grand nombre de personnes, or il est impossible, d’un point de vue sanitaire, de laisser une infection se propager de la sorte.
Du coup, « le nombre de grands laboratoires pharmaceutiques actifs dans [la recherche de nouveaux antibiotiques] a lui aussi diminué », relevait une étude de la Société américaine des maladies infectieuses publiée récemment.
25 000 décès par ans
Pourtant, « face à l’émergence croissante de nouvelles résistances, le faible taux de renouvellement de l’arsenal antibiotique risque de nous ramener à l’époque où les antibiotiques n’existaient pas », s’inquiétait la Société européenne de microbiologie clinique et des maladies infectieuses lors de son congrès, organisé à Berlin, en avril.
Malgré le message de prévention contre l’utilisation automatique de ce mode de traitement, les infections résistantes ont en effet continué à se développer. On estime que 25 000 décès par an en Europe sont imputables à ces dernières. Les maladies infectieuses sont la deuxième cause de mortalité dans le monde. Or, pas de médecine moderne sans antibiotiques : tout ce qui touche au système immunitaire, comme la chimiothérapie, la chirurgie…, doit être compensé par ce mode de traitement. De nouvelles molécules permettraient de ne pas utiliser celles auxquelles les bactéries sont désormais résistantes.