En trente ans, le sida a fait 30 millions de morts dans le monde. Pourtant, il y a peu de temps, un homme a « guéri » de la maladie. Les médecins ont en effet constaté que Timothy Brown, un américain de 47 ans, n’avait plus besoin de médicaments pour vivre à la suite d’un don de moelle osseuse, le donneur ayant été choisi parmi la part de la population mondiale (1 %) qui a développé un gène mutant résistant au VIH. Le taux d’anticorps de Timothy Brown a alors baissé au point que les médecins ont pu déclaré la disparition du virus. Un espoir pour tous les malades, un symbole de l’avancée des connaissances scientifiques et une preuve de la progression de la recherche en matière de traitement médical. D’autant qu’aujourd’hui, grâce à un traitement permanent à base d’antirétroviraux, plusieurs millions de personnes vivent avec le sida.
Un cas isolé
Il faut toutefois tempérer cet enthousiasme, car si Hillary Clinton, à l’instar de certains scientifiques, n’a eu de cesse de répéter qu’une génération sans sida pourrait bientôt voir le jour, elle devra attendre encore de nombreuses années. Le cas de Timothy Brown est en effet totalement isolé et, de l’avis même de son médecin, ce traitement ne pourrait pas être utilisé pour soigner tout le monde : il existe bien trop peu de donneurs possibles. Le principal enjeu est ailleurs. « L’efficacité des médicaments restent la base de la lutte contre le sida », explique Alain Sobel, consultant en immunologie clinique à l’hôpital Henri-Mondor. Mais, ces traitements extrêmement coûteux ne sont généralement accessibles qu’aux personnes vivant dans des pays développés. On est donc toujours très loin de voir le continent africain « guérir » du sida. Par ailleurs, la baisse actuelle du taux d’infection (- 1,5 % par an depuis dix ans), si elle est encourageante, n’est pas suffisante pour espérer mettre un terme à la pandémie.
Manque de financement et protection verrouillée des brevets
Pour agir, les chercheurs dans les laboratoires universitaires et les médecins dans les pays largement touchés par la maladie ont besoin d’argent ; et de beaucoup d’argent. C’est le constat amer qu’a fait Bill Gates, cofondateur de Microsoft et coprésident de la fondation Bill et Melinda Gates qui œuvre pour la lutte contre le sida. « Il est clair que même si on optimise au mieux la façon de faire [dans la recherche de traitements plus radicaux, NDLR], les fonds ne seront pas suffisants pour traiter toutes les personnes atteintes », a-t-il déclaré aux 25 000 délégués mondiaux et activistes présents à la conférence internationale de Washington.
Françoise Barré-Sinoussi, qui a codécouvert le VIH et qui a reçu suite à cela le prix Nobel de médecine, a également tiré une sonnette d’alarme. Elle s’est indignée de l’entrave au développement des soins que représentent les lois régissant la propriété intellectuelle, celles-ci s’appliquant également aux traitements du sida produits par des laboratoires privés. Une réalité économique qui continue d’avoir des conséquences lourdes sur les populations à risque, en Afrique notamment.
D’autres ont conclu cette XIXe conférence internationale sur le sida par une note d’espoir : l’ancien président américain, Bill Clinton, très engagé dans cette cause, pense que continuer à révéler l’avancée des recherches permettra aux financement d’affluer.
2,5 millions de nouvelles infections en 2011
En attendant, plus de 34 millions de personnes dans le monde, dont 2,5 millions étaient des nouveaux cas d’infection, vivaient avec le VIH en 2011, selon l’Onusida. Seuls 8 millions de malades ont reçu un traitement à base d’antirétroviraux sur les 15 millions de séropositifs résidant dans des pays à revenus faibles et intermédiaires. C’est très légèrement plus de la moitié des malades, mais ce n’est malheureusement toujours pas suffisant.