Mardi 31 mai, les députés ont adopté la loi sur la réforme des soins psychiatriques souhaitée par Nicolas Sarkozy à la suite du drame de 2008 impliquant un schizophrène qui, échappé d’un hôpital psychiatrique, avait poignardé un étudiant grenoblois. Cette loi, qui devrait entrer en vigueur le 1er août, largement contestée par les associations de malades et par certains psychiatres pour son caractère sécuritaire, comprend plusieurs mesures phares. La première permettra désormais d’imposer des soins ambulatoires à un malade sans son consentement. S’il ne suit pas son traitement, il pourra être hospitalisé d’office. Jusqu’à présent, les médecins n’avaient pas la possibilité d’obliger un patient à se soigner. Seule l’hospitalisation pouvait se faire sans son consentement. Pour les organisations professionnelles de psychiatres, cette nouvelle mesure n’est pas acceptable, puisqu’elle rompt la confiance qui existe entre le malade et son médecin, une confiance indispensable à une prise en charge thérapeutique efficace.
L’hospitalisation sous contrainte élargie
Autre mesure : l’élargissement des possibilités d’internement sous contrainte en hôpital psychiatrique. Jusqu’ici, une personne pouvait être hospitalisée d’office par le préfet ou le maire, ou bien suite à la demande d’un tiers et après avis médical. Dans ce dernier cas, le maintien à l’hôpital sans intervention extérieure (aval du préfet) ne pouvait excéder vingt-quatre heures. Désormais, cette hospitalisation pourra se faire à l’initiative de l’établissement (et donc du directeur), et ce pour une période de soixante-douze heures. Enfin, tout internement sous contrainte dont la durée dépasse quinze jours sera soumis au contrôle du juge des libertés et de la détention.
Bref, un ensemble de décisions dénoncées à l’unisson par de nombreux opposants, professionnels de la psychiatrie ou non, réunis notamment au sein du « Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire », auteur d’une pétition qui a déjà recueilli plus de 30 000 signatures. Pour le collectif, ce texte « va instaurer une logique de dérive sécuritaire induisant un contrôle inédit de la population. Il s’appuie sur un principe de précaution inapproprié ». Quoi qu’il en soit, le vote de la loi est intervenu le jour même où l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) remettait un rapport soulignant de graves dysfonctionnements au sein des hôpitaux psychiatriques. Des dysfonctionnements essentiellement dus au manque de moyens dévolus aux soins et à l’accueil des malades, dont l’état et la sécurité se dégradent.