Entre 5 000 et 10 000, c’est le nombre de nouveaux cas de cancers professionnels qui se déclarent chaque année, selon le magazine trimestriel Santé et Travail daté d’octobre 2014, qui a eu connaissance des chiffres réactualisés par l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). Une estimation deux à trois fois supérieure au nombre de cancers reconnus comme maladies professionnelles par l’Assurance maladie, de l’ordre de 1 700 par an, dont 1 500 dus à l’amiante. Même si les organismes chargés de la prévention des risques professionnels ont développé ces dernières années des dispositifs de vigilance, de veille et de surveillance, le lien entre cancer et travail reste généralement difficile à faire apparaître : rien ne distingue un cancer professionnel d’un autre. Sans compter que la maladie se manifeste dix, vingt, trente ans ou plus après l’exposition à un ou plusieurs agents cancérogènes pendant le travail. Les causes sont bien souvent complexes, mêlant facteurs environnementaux, familiaux ou génétiques et mode de vie. Mais cela ne doit pas conduire à nier l’impact des conditions de travail pour privilégier l’explication, insuffisante, selon laquelle les comportements individuels seraient en cause.
10 % des salariés exposés
En 2010, d’après l’enquête Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels (Sumer), 10 % des salariés, soit près de 2,2 millions de personnes, ont été exposés à au moins un produit chimique cancérogène au cours de la dernière semaine travaillée. En 2012 sont apparus 335 000 nouveaux cas de cancers, toutes causes et toutes localisations confondues, selon les chiffres de l’INSR cités par Santé et Travail. Mais combien peuvent être imputés à une exposition professionnelle, demande le magazine, qui explique que 2 à 9 % des cancers du larynx et du poumon chez les hommes, soit de 600 à 2 500 cas, seraient attribuables à la silice ? Entre 260 et 660 cas de cancer du rein seraient par ailleurs associés à l’exposition au trichloréthylène et autant seraient provoqués par le ciment. L’amiante pourrait être responsable dans 3 600 à 4 700 cas de cancer. La forte médiatisation de cette cause n’empêche pas que les autres cancers professionnels sont peu évoqués.
Une contamination insidieuse
Les secteurs où le risque cancérogène est le plus important sont l’industrie du bois, la métallurgie, la chimie, la plasturgie, le bâtiment et les carrières, mais de nombreuses autres activités sont aussi potentiellement concernées, comme les laboratoires, la désinfection en milieu hospitalier et dans l’agroalimentaire, la maintenance, le nettoyage ou le dépannage... D’après une étude publiée en septembre 2013 par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), les cancérogènes les plus souvent cités sont les gaz d’échappement diesel, les huiles minérales entières, les poussières de bois et la silice cristalline. Le contact avec ces agents cancérogènes peut se faire de différentes façons, parfois insidieuses : par inhalation, mais aussi par voie cutanée ou par ingestion. Ainsi, il est essentiel de consulter les étiquettes des produits et de limiter l’exposition par des modes opératoires et des précautions à respecter.